C’était la volonté du nouveau président colombien Gustavo Petro, investi en août 2022. L’État sud-américain sera le premier pays producteur de pétrole à cesser ses exportations. Le ministre des Finances réclame des aides mondiales pour cet engagement climatique.
Sera-t-il entendu, contrairement à l’Équateur, en 2007 ?
Cela prendra quelques années, mais la Colombie sera sans doute le premier pays producteur de pétrole au monde à se passer de ce combustible fossile, au nom de la lutte contre le réchauffement climatique. C’était l’engagement audacieux de Gustavo Petro, annoncé dès la campagne électorale en juin 2022. Il a failli lui coûter la victoire : 50,47 % pour cet ancien guérillero de gauche, investi président en août, contre 47,27 % pour son adversaire de droite, un homme d’affaires populiste.
40 % des exportations
La politique pétrolière du gouvernement Petro a été allègrement critiquée et même qualifiée de « suicide économique ». Beaucoup d’observateurs prédisaient un revirement. En pleine crise mondiale – avec la fin du Covid, le conflit Russo-Ukrainien, les répercussions sur l’inflation, les prix de l’énergie, de l’alimentation –, faire une croix sur une production qui représente 40 % des exportations du pays et 12 % des recettes de l’État va creuser « un grand trou dans les finances publiques », martelaient les opposants.
La Colombie de Petro veut ignorer ces cassandres. À Davos en Suisse, vendredi 21 janvier 2023, devant les dirigeants du monde entier, la ministre colombienne des Mines, « Irene Vélez », a confirmé que « plus aucun nouveau permis pétrolier ou gazier ne serait dorénavant accordé ». Le pays ne sera pas immédiatement à sec. Il lui reste environ dix-huit années de réserves pétrolières connues, soit environ 2,3 milliards de barils, vingt-trois (23) années si la Colombie cesse ses exportations et réserve sa production à sa consommation intérieure. Ce qu’a plutôt en tête Gustavo Petro. Et si les énergies renouvelables sont déployées et prennent le relais, la sortie serait hâtée.
Garder le pétrole restant à la maison
Encore faut-il de l’argent pour le faire et compenser les pertes des ventes de barils. Lundi, lors d’un discours sous l’égide de l’agence des Nations unies sur le commerce et le développement (UNCTAD), le ministre colombien des Finances, « José Antonio Ocampo », a appelé à des actions politiques et économiques d’envergure pour s’attaquer à la cascade actuelle de crises mondiales qui commencent à mettre plusieurs pays en voie de développement dans le rouge, voire en cessation de paiement de leurs dettes. Alors que « l’urgence est aussi de financer l’atténuation et l’adaptation au changement climatique ».
Le monde aidera-t-il la Colombie ?
Le Danemark et le Costa Rica, membres fondateurs de la Beyond Oil and Gas Alliance (l’après-pétrole et gaz), dont la France fait partie, ont promis leur soutien, lundi 23 janvier, à la Colombie. Mais leur petit fonds initial de dix millions d’euros ne sera pas suffisant …
Le plan de sortie des fossiles de la Colombie sera un bon test pour le monde et ses grandes banques. « Être payé (3,6 milliards d’euros) pour laisser le pétrole dans le sous-sol » et préserver la biodiversité de la forêt tropicale, c’est ce qu’avait proposé, en 2007, un autre dirigeant sud-américain de gauche, l’ex-président équatorien Rafael Correa. Le monde avait dit « non merci », à l’époque.