L’optimisation des systèmes de climatisation : une piste vers la transition énergétique

Rédaction (A.M)
Economie d'énergie
Rédaction (A.M)11 septembre 2024
L’optimisation des systèmes de climatisation : une piste vers la transition énergétique

Par : Merahi Reda, Docteur et chercheur en énergie

La transition énergétique est un sujet d’actualité qui anime un débat intense entre divers acteurs, politiciens, experts et chercheurs. Beaucoup pensent que la transition énergétique consiste uniquement à passer des ressources conventionnelles aux énergies vertes et renouvelables. Cependant, elle offre également d’autres pistes et solutions envisageables pour accélérer ce processus et l’appliquer à grande échelle.

Parmi ces pistes, la rationalisation de l’énergie électrique inclut l’optimisation de l’énergie, de manière directe ou indirecte. Les systèmes de climatisation représentent l’un des domaines qui consomment des quantités considérables d’électricité, aussi bien au niveau national qu’international. Dans cet article, nous aborderons l’optimisation des systèmes de climatisation en Algérie comme une piste vers la transition énergétique, en présentant différents choix et options adaptés à notre société.

Mots-clés : Transition énergétique, rationalisation de l’énergie électrique, systèmes de climatisation, énergies renouvelables.

  1. Avant-propos

Ces dernières années, la demande en climatiseurs a connu une croissance considérable. Il est désormais rare de trouver des immeubles ou des logements sans ces appareils. Conçus initialement pour le confort, ils sont devenus essentiels, surtout en période de canicule, lorsque les températures dépassent les 40°C. Malheureusement, ces seuils de température sont devenus normaux, même dans les régions côtières, conséquence directe du changement climatique affectant notre planète.

La problématique des systèmes de climatisation ne réside pas tant dans les appareils eux-mêmes que dans leur utilisation, que ce soit en termes de nombre d’unités installées ou de modes de fonctionnement, comme le réglage de la température. En Algérie, aucune loi ou décret ne régit le nombre d’unités autorisées à être installées dans les immeubles, ce qui laisse les consommateurs libres d’installer ces appareils en fonction de leur niveau de vie.

  1. Instructions pour l’installation

La capacité d’un appareil de climatisation à installer dépend de plusieurs facteurs tels que la surface du local, le nombre d’occupants, le type d’isolation, etc. Selon les guides pratiques, le dimensionnement d’un système de climatisation inclut d’autres facteurs et spécifications. En règle générale, les recommandations sont les suivantes :

Volume (m²)Puissance (BTU)Puissance (kW)
Jusqu’à 25 m²6000 à 90001,75
25 m² à 50 m²12000 à 180003,51 à 5,27
50 m² à 70 m²240007,02
Au-delà de 70 m²300008,78

Avant d’installer un appareil de climatisation, il est essentiel de faire appel à un spécialiste en froid ou de consulter des guides techniques. La sélection aléatoire des appareils n’est pas recommandée, et les vendeurs ne sont pas des spécialistes.

  1. Choix des appareils

Le marché national propose différentes marques nationales et internationales. Les clients basent souvent leur choix sur le rapport qualité-prix, négligeant d’autres facteurs importants tels que la consommation énergétique et le type de climatiseur (Inverter ou Tropical). Depuis l’arrivée sur le marché de la technologie Inverter développée par TOSHIBA, ce modèle de compresseur consomme jusqu’à 30 % moins d’énergie qu’un appareil classique. Si cette technologie est généralisée, il est possible de conserver le confort de la climatisation tout en réduisant la consommation d’électricité. Bien que le coût initial de ces appareils soit élevé, leur amortissement est réalisé grâce aux économies sur la facture d’électricité.

  1. La pointe de consommation et les systèmes de climatisation

En Algérie, en raison de la croissance démographique et de l’extension des villes, la pointe de consommation d’électricité augmente chaque année, atteignant de nouveaux records par rapport à l’année précédente. Il y a quelques années, la pointe de consommation se situait en hiver, entre 19h00 et 20h00, coïncidant avec le retour des citoyens à leurs foyers et l’utilisation massive des appareils électriques, en particulier des appareils de chauffage. Grâce à l’extension du réseau de gaz naturel, de nombreux foyers sont passés au chauffage au gaz plutôt qu’au chauffage électrique.

Entre 2007 et 2010, la pointe de consommation estivale a commencé à dépasser celle de l’hiver, devenant ainsi prépondérante en été. De ce fait, les préparatifs pour faire face à cette pointe se concentrent désormais sur l’été, en raison de l’augmentation de l’utilisation des climatiseurs pendant les périodes de canicule qui touchent plusieurs régions du pays. La pointe de consommation est désormais fortement liée à ces périodes où les températures dépassent les 40°C, un signe très préoccupant qui nécessite des mesures pour optimiser l’utilisation massive de ces appareils, afin de rationaliser la consommation d’énergie électrique et d’éviter les coupures.

Par ailleurs, cette année a enregistré plusieurs pointes, dont la plus élevée a atteint 19 500 MW, soit une hausse de près de 1 GW par rapport à l’année précédente. Cet écart est très préoccupant, sachant que cette puissance correspond à celle d’une grande centrale. Ainsi, pour couvrir la pointe de consommation dans les années à venir, il faudrait construire chaque année une centrale de 1 000 MW ou plus, ce qui n’est pas toujours facile à réaliser, car la durée de construction, depuis l’élaboration des cahiers des charges jusqu’à la réception finale de la centrale, peut prendre de 5 à 7 ans, voire plus. De plus, pour construire une centrale de cette puissance, un budget estimatif de 1 milliard de dollars est nécessaire, car le coût moyen d’un MW est d’environ 1 million de dollars. Ce budget est conséquent et difficile à mobiliser. Par ailleurs, l’Algérie a la chance de disposer d’une puissance installée d’environ 25 GW, mais si nous ne préservons pas cet écart, cette capacité risque de s’épuiser rapidement.

  1. Solutions et mesures à entreprendre

Dans ces circonstances, il est impératif d’agir en urgence pour réduire notre consommation due aux systèmes de climatisation. Laisser ces systèmes fonctionner sans régulation peut engendrer des conséquences indésirables.

Pour cela, il est nécessaire de mettre en place des solutions capables d’apporter une réelle amélioration, tout en développant des systèmes alternatifs pouvant remplacer les systèmes de climatisation classiques. À cet effet, nous proposons les mesures suivantes :

  • Législation : Adopter une loi ou un décret encadrant l’utilisation des appareils de climatisation dans les immeubles. Ces lois exigeraient l’application des normes et standards nationaux et internationaux pour les appareils de climatisation.
  • Promotion des nouvelles technologies : Promouvoir auprès des fabricants et investisseurs l’utilisation de nouvelles technologies telles que la climatisation solaire par absorption (a), par évaporation (b), ou par pompes à chaleur (c) (voir Figure 1). La climatisation solaire par absorption est optimale, car l’augmentation de l’utilisation des climatiseurs dépend directement de la hausse des températures, c’est-à-dire que la puissance du climatiseur augmente en fonction de la température ambiante. Ce type de climatisation est considéré comme une option idéale, non seulement parce qu’il fonctionne avec l’énergie solaire, mais aussi parce qu’il est indépendant du réseau électrique.
2 - energymagazinedz
  • Centralisation des systèmes de climatisation : Une autre option pour organiser l’utilisation de la climatisation est la centralisation de ces systèmes au niveau des immeubles. Cette solution permet de fournir de l’air frais dans toutes les pièces, évitant ainsi l’installation aléatoire d’appareils par les clients. Elle est également plus économe en énergie, puisqu’il est généralement possible d’utiliser deux appareils sur la terrasse qui fonctionnent en alternance en fonction de la charge. De plus, le fonctionnement de deux ou trois appareils au sein d’un immeuble permet de limiter le nombre de démarrages programmés, contrairement aux appareils individuels, qui ont des démarrages plus fréquents et aléatoires. C’est pourquoi il est recommandé que les entreprises d’urbanisme (AADL, OPGI, LSP, ENPI) appliquent la solution centralisée de systèmes de climatisation dans les immeubles.

3 - energymagazinedz 

  • Sensibilisation des utilisateurs : Informer les utilisateurs sur les avantages des appareils à faible consommation d’énergie, comme la technologie Inverter, et les encourager à abandonner progressivement les appareils classiques énergivores.
  1. Conclusions et recommandations

Cet article a abordé la question cruciale de la mauvaise utilisation des climatiseurs et son impact sur la consommation d’énergie, notamment lors des pointes annuelles. Ainsi, pour rationaliser l’utilisation des systèmes de climatisation, il est recommandé d’encadrer leur fonctionnement par des lois et des décrets.

Par ailleurs, il est essentiel que les consommateurs optimisent l’utilisation de ces appareils et choisissent ceux qui consomment moins d’énergie, comme les climatiseurs Inverter. De plus, les fabricants devraient intégrer les nouvelles technologies telles que la climatisation solaire par absorption, par évaporation ou par pompe à chaleur dans leurs produits, afin de remplacer progressivement les systèmes à détente directe. En outre, les investisseurs et les startups doivent être encouragés à investir dans ces nouvelles technologies pour rendre ces appareils abordables pour les clients.

En effet, la climatisation solaire par absorption est une solution optimale pour une région ensoleillée comme l’Algérie, offrant une indépendance par rapport au réseau électrique grâce à l’énergie solaire.

Par conséquent, il est nécessaire de fixer des objectifs à court et long terme pour rationaliser l’énergie électrique et optimiser l’utilisation des systèmes énergivores tels que les climatiseurs, désormais responsables de la pointe de consommation en Algérie.

Enfin, dans notre engagement pour la transition énergétique, nous aborderons dans un prochain article un autre sujet crucial : les moyens d’accélérer cette transition de manière efficace et durable.

Références :

[1] Heating, Ventilating, and Air-Conditioning Systems And Equipment, 2020 ASHRAE, HANDBOOK

[2] The Future of Cooling, Opportunities for Energy-efficient air conditioning, International Energy Agency, OECD/IEA, 2018.

[3] La climatisation dans le bâtiment, Etat des lieux et perspectives 2050, Rapport final ADEME, 2021

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